Cyril Lascassies est enseignant en mathématiques au Lycée Théophile Gautier de Tarbes, depuis 2018, enseignant en technologie de 2002 à 2018 et membre du CRAP (cahiers pédagogiques) et d’autres collectifs. Il partage avec sa pratique de la classe coopérative (CC).
Questions d’Éduc
Depuis quand pratiquez-vous la CC et pourquoi ce passage en classe coopérative ?
Cyril Lascassies :
Je ne peux pas dire que je suis en « classe coopérative » puisque je suis le seul enseignant de l’équipe éducative à travailler ainsi… pour le moment. Toutefois, depuis une dizaine d’années, je mets en place quelques dispositifs utilisés en classe coopérative, au fur à mesure de mes besoins et de l’évolution de mes connaissances dans ce domaine.
L’introduction de différents outils (travail en groupe, en équipe, entraide, aide, tutorat, jeux coopératifs, plan de travail, etc.) est induite par les programmes de technologie, alors que c’est pour moi un moyen au service de la différenciation en mathématiques.[…]
Questions d’Éduc :
Qu’est-ce que cela change pour les élèves ? Les enseignants ?
Cyril Lascassies :
En classe coopérative, il faut d’abord savoir qu’on ne travaille pas à plusieurs tout le temps, comme il n’y a pas forcément d’îlots en classe !
Une séance comporte des moments où nous avançons toute la classe au même rythme (consignes, situations-problèmes, leçons, quelques corrections…), de façon classique, alternés avec des moments de travail personnalisé (entraînement, auto-correction…), où il est possible de travailler seul, ou à plusieurs. Sans oublier des moments de travail individuel (travaux de recherche, évaluation…), car s’il peut être facilitant d’apprendre à plusieurs en début d’apprentissage, au final, on ne peut apprendre que tout seul.
Côté élève, le premier changement est de ne pas être obligé d’attendre que le professeur soit disponible pour être débloqué. Si les élèves ont plus de libertés, ça conduit à davantage de responsabilités. Ceux qui sont autonomes y trouvent alors très vite leur compte, quand d’autres vont être perturbés par cette exigence. C’est pourquoi, ils seront un temps en conduite accompagnée, afin de ne pas être plus désavantagés que dans une situation de classe ordinaire. […]
Côté enseignant, le principal avantage est de développer le don d’ubiquité : impossible de me diviser en 35, alors un plan de travail avec des degrés d’autonomie et la possibilité de coopérer libéreront les élèves les plus aguerris de l’attente de ceux qui ont plus de mal à suivre le rythme commun. Pendant ce temps, je pourrai donner plus à ces derniers, ceux qui en ont le plus besoin. Tout le monde peut donc y gagner, une fois que l’on apprend collectivement à entretenir le calme (bien rare et précieux) et que chacun devient responsable de ses apprentissages. […]
Questions d’Éduc :
Y voyez-vous un moyen de travailler certaines des valeurs de la république dont on parle souvent ?
Cyril Lascassies :
Je rappelle que mon objectif premier est d’offrir à chaque élève les conditions pour qu’il progresse : la coopération est aujourd’hui pour moi un moyen, pas un but. Toutefois, ces moments de coopération permettent de vivre des instants de liberté et de fraternité. C’est donc une occasion supplémentaire de prendre conscience des dérives possibles et des conditions de réussite. Le débriefing après un jeu coopératif en est un parfait exemple. […]
Nous savons pertinemment que nos élèves ne partent pas avec les mêmes chances. C’est pourquoi, il faut distinguer égalité, voire égalitarisme, et équité. Il s’agit donc d’équité, qui repose sur la volonté de comprendre les élèves et de donner à chacun ce dont il a besoin pour progresser et s’épanouir.
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