La dictée n’a jamais disparu des classes, elle peut même être un loisir et rassembler des adultes, fondus de l’orthographe et de la grammaire dans des concours. Pourtant, la petite musique du « niveau qui baisse » et celle des « jeunes qui ne savent plus écrire » est bien installée dans la population. Quel ministre de l’éducation n’a pas été tenté de faire une communication publique pour évoquer un « plus de dictée », magique et réparateur ? Questions d’Educ fait le point sur les pratiques contemporaines autour de l’ancestrale dictée.
Difficultés à écrire en français
Il faut admettre que depuis toujours, écrire en français pose toutes sortes de défis. Les règles qui s’imposent dans notre langue sont si nombreuses qu’il y en a toujours une qu’on peut oublier et qui réussit à nous piéger, tout en piégeant aussi les correcteurs orthographiques numériques. Il faut admettre également que les pratiques actuelles de la communication s’affranchissent de l’orthographe, de l’écriture « sans fautes » : sms, vocaux, émoticônes, … les messages sont passés, sans souci orthographique. Nos smartphones sont bien pratiques pour contourner les usages de l’écrit. Qui n’a pas participé à un colloque, une conférence, un cours en amphi, et constaté cette pratique de la prise en photo du support présenté au détriment de la bonne vieille prise de notes ?
Mais pour autant, savoir bien écrire est encore, et peut-être plus que jamais, d’une importance capitale. C’est un marqueur social, déterminant pour l’insertion professionnelle. Comme l’écriture est intimement liée à la lecture et à la pensée, on ne peut pas en sous-estimer l’importance. Pour maîtriser une langue, il faut la comprendre, et il faut en apprendre les règles de fonctionnement.
De l’usage de la dictée
La dictée est un outil d’évaluation car écrire un texte sous la dictée suppose de savoir transcrire l’oral en écrit en respectant toute ses règles. Alors stop aux idées reçues, plus de dictées ne peut pas améliorer le niveau de maîtrise de la langue !
La dictée a changé dans les classes, elle est bien présente sous de multiples formes, bien plus nombreuses aujourd’hui que qu’hier parce que les enseignant.es, en font un outil d’apprentissage. La dictée est préparée, négociée, gagnante. Elle est à trous, elle est centrée sur une liste de mots ou sur une phrase unique, elle est auto-dictée. Elle peut aussi être « flash » ou « frigo ».
Une dictée flash est un texte court écrit au tableau par le professeur, expliqué, puis effacé et dicté aux élèves.
Dans la dictée « frigo », les élèves écrivent la dictée, puis la mettent de côté (au frigo). L’enseignant montre le texte aux élèves et l’analyse avec toute la classe. Ensuite, il cache le texte et chaque enfant reprend sa propre dictée et la corrige de mémoire.
Elle peut aussi être partagée via les réseaux sociaux, ainsi est née la « twictée ». C’est une phrase dictée par l’enseignant et écrite par les élèves qui la révisent ensuite en groupe à l’instar de la dictée négociée. Puis, chaque groupe affiche sa phrase sur Twitter pour être corrigée une deuxième fois par un groupe d’élèves dans une autre classe. Des échanges entre classes font ainsi progresser le questionnement sur la langue et donc l’apprentissage.
Pour savoir écrire comme pour tout autre apprentissage, il faut s’entraîner, mémoriser, se questionner et pratiquer. Des pratiques diverses et exigeantes, qui mobilisent le corps et le cerveau. La dictée n’est ni une fin en soi, ni un outil miracle parce qu’il a traversé les siècles. Plus on multiplie les occasions d’écrire, plus on avance vers une écriture maîtrisée, conforme aux règles françaises. C’est tout l’art de la pédagogie que de réussir à créer, inventer des situations qui entraineront toujours des pratiques réflexives et des occasions d’appliquer les règles apprises. Et si les ministres s’intéressaient aux pédagogies, plutôt que répéter de vieux messages éculés ?
Pour aller plus loin:
Regards de chercheurs sur la twictée
Ressource historique : la dictée de Mérimée, sur le site de la BNF
Des concours de dictée de nos voisins suisses, pour s’entrainer par le Web
Questions d'Éduc 